L’ère d’une RSE menée de manière volontaire et épisodique appartient désormais au passé, cédant la place à la norme de la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD), qui introduit un nouveau cadre de référence.
Cependant, son application pratique, élargie aux entreprises de plus de 250 salariés, se révèle complexe et constitue un enjeu majeur pour ces acteurs économiques. La charge de reporting exigée par la CSRD, particulièrement chronophage et exigeante en ressources, risque de saper les efforts dédiés à l’implémentation de véritables actions transformatrices. Ce défi est particulièrement prégnant pour les PME, qui, contrairement aux grands groupes, pourraient souffrir d’une disproportion entre les exigences croissantes et les moyens disponibles.
Un référentiel allégé attendu
La CSRD introduit également un nouveau périmètre de l’entreprise et exerce une pression sur toute la chaîne de valeur, affectant surtout les fournisseurs et prestataires de petite taille. Bien que les PME, pilier de notre économie, soient relativement à l’abri des obligations légales directes, force est de constater qu’ elles peinent à répondre aux demandes croissantes et spécifiques en matière de RSE de la part de leurs clients importants. La qualité, la disponibilité et le prix ne sont plus les seuls critères pour rester compétitifs : désormais, les PME tirent leur avantage concurrentiel de la maturité de leur démarche RSE.
Dans ce contexte, le dialogue avec les parties prenantes devient un pilier fondamental d’une approche sensée. Il est essentiel que les grandes entreprises harmonisent leurs attentes avec leurs partenaires plus modestes, afin d’assurer une compréhension mutuelle et l’accessibilité des objectifs.
À cet égard, l’EFRAG (Groupe consultatif européen sur l’information financière) s’emploie actuellement à élaborer un modèle de rapport de durabilité allégé, spécifiquement conçu pour les PME.
Ce nouveau référentiel, attendu dans les prochains mois, devrait considérablement les aider à répondre aux questionnaires de leurs gros donneurs d’ordre, d’autant qu’il a été conçu de manière consensuelle en prenant en compte les obligations des grandes entreprises en matière de durabilité et les contraintes de moyens des PME.
Les moyens à mettre en oeuvre
La RSE nécessite désormais une transformation en profondeur des pratiques, qui implique des moyens.
Le premier passe par la sensibilisation de l’ensemble des collaborateurs pour casser les idées reçues en matière de RSE et expliquer la démarche de l’entreprise : pourquoi elle se lance ? Qu’est-ce qu’elle en attend ? Qu’est-ce que ce projet va impliquer ?
La RSE n’est pas une mode ! C’est une discipline qui a son histoire, ses théoriciens, sa norme, sa méthodologie et ses obligations règlementaires.
Malgré les défis quotidiens, l’acquisition des compétences spécifiques est la seconde étape décisive pour la réussite du projet. Dialoguer avec ses parties prenantes, matérialiser ses enjeux, construire un plan d’action réaliste et le suivre, calculer son empreinte carbone, rédiger son rapport RSE , obtenir un label, accompagner les changements… sont autant d’expertises nécessaires à la mise en oeuvre d’une réelle démarche RSE. Au regard des enjeux, un accompagnement ponctuel au lancement du projet semble incontournable pour le mettre en orbite et donner les clés de sa réussite.
La RSE implique aussi un système de preuves des engagements que l’entreprise prend pour réduire les impacts sociaux et environnementaux de ses activités. Les données sont disponibles mais elles ne sont pas accessibles. Les montants des factures d’eau, par exemple, sont traités en comptabilité mais pas les consommations indiquées. Or, en termes de préservation des ressources, la RSE s’intéresse à ce type de données. Cette capacité à traiter des données jusqu’alors inexploitées devient clé car c’est sur elle que repose les preuves attendues, les indicateurs demandés qu’ils soient quantitatifs ou qualitatifs.
Enfin, la RSE est un investissement pour un développement durable : point de transformation sans un plan d’action ambitieux et donc coûteux, à court terme. Si le retour sur investissement est peu immédiat, en revanche, il est certain. Une mise en œuvre efficace de la RSE, répondant aux exigences des grands donneurs d’ordre et accélérant l’adoption de pratiques durables, est un enjeu stratégique et doit être considéré comme tel.
Pour reprendre les propos d’un chef d’entreprise à un homologue septique : “si vous pensez que la RSE coûte chère, essayez donc de vous en passer !”